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Guide d'aménagement des lieux d'élimination de neige et mise en oeuvre du Règlement sur les lieux d'élimination de neige2. Qualité de la neige en milieu urbainDans le cycle hydrologique, l'évaporation est un processus qui purifie l'eau en la libérant de tout contaminant. En conséquence, les précipitations devraient être pures. Toutefois, à l'échelle terrestre, pluie et neige s'associent déjà dans l'atmosphère à bon nombre de polluants d'origine naturelle (cendres volcaniques, etc.) et humaine (poussières industrielles, cendres, gaz de combustion, etc.). Ainsi, avant même de toucher le sol, la neige est déjà contaminée. Cependant, il faut tout de suite préciser que la contamination de la neige est, à cette étape, bien faible par rapport à ce qui l'attend en milieu urbain Étrangers à la composition de la neige, les abrasifs, les fondants, les débris, les huiles et graisses, les matières en suspension (MES) ainsi que les métaux qui leur sont associés deviennent des contaminants. Le tableau III présente la source des divers contaminants fréquemment retrouvés dans la neige en milieu urbain. 2.2 Concentration des contaminantsLe tableau IV présente des valeurs de concentration, selon les études consultées, des divers contaminants présents dans les neiges usées, dans les eaux usées d'égout unitaire et les eaux d'égout pluvial. On y retrouve aussi, à titre de comparaison, la norme municipale de rejet dans le réseau d'égout pluvial. 2.2.1 DébrisLes débris sont des solides grossiers, de diamètre supérieur à 63 microns (µ), ou, selon d'autres auteurs, des solides décantables ou flottables malgré une agitation. Les débris peuvent représenter 1 % à 4 % du volume des neiges usées (Delisle, 1991). Ces pourcentages peuvent paraître faibles, mais ils correspondent à plusieurs milliers de milligramme par litre (mg/l). Lapointe (1991) a mesuré, dans des neiges usées qui ont connu plusieurs cycles de gel et de dégel, 3,5 litres de gravier dans 320 litres de neige, ce qui représente 1,1 % du volume de neige. Le poids du gravier étant de 6,35 kilogramme (kg) pour 116,3 litres d'eau, on obtient une concentration de 55 000 mg/l de gravier (équivalent à 5,5 % en poids). Dans un second échantillon, le même auteur a mesuré 26,31 kg de gravier, représentant un volume de 17 litres dans un volume de neige de 423 litres, soit environ 4 % de débris. Si l'on compare ce résultat à celui de sa première analyse, on obtient environ 170 000 mg/l de gravier (équivalent à 17 % en poids). Zinger et al (1985) rapporte une valeur en débris de 5 888 mg/l (équivalent de 0,6 % en poids). La Ville de Montréal prévoit utiliser 19 169 000 kg d'abrasifs pour l'année 1996-1997. En supposant qu'elle recueille un volume de neige de 7 000 000 mètres cube par an (m3/an), à une densité relative de 0,5, avec un taux de capture des abrasifs dans la neige de 80 %, on obtient environ 4 000 mg/l d'abrasifs. Les concentrations de débris sont donc très élevées. C'est le paramètre le moins mesuré, comme on peut le constater au tableau IV.
Pour le raccordement au réseau d'égout pluvial, il n'y a pas de norme exprimée sous forme de concentration pour les débris. On retrouve plutôt une liste d'interdiction de rejet de certains éléments (cendres, sable, terre, paille, cambouis, résidus, etc.). Les eaux ne doivent donc contenir aucun débris. Les débris retrouvés dans les neiges usées ne permettent donc pas de respecter la norme pour le raccordement au réseau pluvial.
La quantité de débris retrouvés dans la neige peut être 500 fois plus élevée que la quantité de débris retrouvés dans les eaux usées d'égout unitaire, soit 4000 mg/l comparé à 8 mg/l. La valeur de débris des eaux d'égout unitaire a été calculée à partir des données contenues dans le rapport de Purenne (1994). En effet pour l'année 1993, on a recueilli, à la station d'épuration de la Communauté urbaine de Montréal, 449 060 kg de résidus et 4 487 340 kg de sable, avec un débit moyen annuel de 1 710 000 mètres cube par jour (m3/d)
Le tableau IV ne présente pas de données sur la concentration des débris dans le ruissellement des eaux de pluie. Toutefois, on peut comprendre que la concentration des débris est plus élevée dans la neige que dans les eaux de pluie pour les raisons suivantes :
2.2.2 Matières en suspensionLes matières en suspension (MES) sont, selon le Standard Methods for Examination of Water and Wastewater, des solides gardés en suspension par agitation qui possèdent un diamètre supérieur à 2 µ, ou selon Zinger et al. (1985), des solides compris entre 0,45 à 63 µ. Dans la neige, les MES varient généralement de 500 à 2 000 mg/l mais peuvent atteindre 8 000 mg/l. Ces concentrations équivalent à 0,05 %, 0,2 % et 0,8 % en poids. Les quantités de MES qu'on retrouve dans la neige sont bien supérieures à celles des eaux usées, de l'eau de ruissellement ou à la norme municipale pour le raccordement au réseau d'égout pluvial (voir le tableau IV). Bien qu'étant en concentration inférieure aux débris, les MES contiennent 79 % des métaux lourds, comme on peut le constater au tableau V. 2.2.3 Huiles et graissesLes huiles et graisses dans les neiges usées peuvent atteindre 13 à 105 mg/l (tableau IV). Leur concentration y est plus importante que dans les eaux usées d'égout unitaire et dans les eaux pluviales. De plus, trois études sur quatre montrent des dépassements de la norme pour le raccordement au réseau d'égout pluvial. 2.2.4 IonsLa présence des ions dans la neige est principalement due à l'épandage de fondants. Une partie des fondants est entraînée avec les eaux de fonte sous forme d'ions vers le drainage des voies de circulation. Le reste des fondants demeure dans la neige. Les concentrations en ions chlorure (Cl-) dans la neige excèdent celles de l'eau pluviale. Les chlorures peuvent, temporairement, excéder la norme de 1 500 mg/l pour le raccordement au réseau d'égout pluvial. Il n'existe pas de norme de rejet pour les chlorures dans les réseaux d'égouts unitaires et domestiques. Le sodium (Na+) et le calcium (Ca++) sont les composants majeurs des sels de déglaçage. Une concentration excessive de ces sels peut causer des problèmes s'ils se retrouvent dans des eaux servant à l'alimentation en eau ou à l'irrigation. 2.2.5 MétauxLes neiges usées contiennent plusieurs métaux qui peuvent excéder la norme pour le raccordement au réseau d'égout pluvial, notamment le fer et le plomb, et ce, malgré l'usage d'essence sans plomb. Les métaux sont présents majoritairement sous forme particulaire, comme on peut le constater au tableau V.
2.3 Variabilité des contaminantsIl y a plusieurs facteurs qui influencent les concentrations des contaminants dans les neiges usées. Ces facteurs peuvent être d'ordre analytique, climatique et humain 2.3.1 Facteur analytique
Lapointe (1991) mentionne :
Lapointe (1991) recommande une méthode de prélèvement de l'andain formé juste avant le chargement, en transect de 4 échantillons de 20 litres pour les 10 premiers mètres et 2 échantillons additionnels pour chaque longueur de 10 mètres subséquentes. L'andain formé pour le chargement a l'avantage d'inclure toutes les neiges usées et les polluants. On doit donc porter une attention particulière à la méthode d'échantillonnage, que ce soit lors des prélèvements ou lors de l'interprétation des résultats. Il est évident qu'un nombre élevé de prélèvements ou d'échantillons est souhaitable puisque les neiges usées en milieu urbain sont hétérogènes. Il est bon de noter que les prélèvements dans les camions, méthode utilisée dans l'étude Zinger et al.(1985), demeure une méthode valable. Elle ne devrait pas engendrer un biais systématique comme celle de l'andain au bord des rues. Les désavantages de la méthode de l'échantillonnage dans les camions sont qu'elle ralentit le rythme du chargement-déchargement et qu'elle comporte un risque d'accident élevé.
Plusieurs paramètres ont été analysés dans les neiges usées. Il est important que les paramètres choisis identifient adéquatement la qualité des neiges usées. Plusieurs paramètres sont relativement faciles à analyser. Toutefois certains peuvent voir leurs valeurs faussées par des interférences et/ou des manipulations analytiques difficiles. Deux de ces paramètres sont la demande chimique en oxygène (DCO) et les débris. La demande chimique en oxygène L'analyse de la demande chimique en oxygène peut être faussée par les chlorures qui contribuent à la DCO (Leclair, 1987). Il faut donc interpréter les résultats de la DCO avec beaucoup de réserve puisque la demande chimique en oxygène n'est plus reliée qu'à la seule matière organique mais également aux chlorures. Dans les études récentes, la DCO n'est plus analysée. Les débris Peu d'études portant sur l'analyse des débris présents dans les neiges usées ont été produites en raison de la difficulté que comporte ce genre d'analyse. Deux études seulement ont été répertoriées, ce sont celle de Zinger et al (1985), qui a fait 93 analyses de débris, et celle de Lapointe (1991), qui a réalisé 2 analyses. Divers éléments expliquent le peu d'analyses sur les débris. Premier élément : « débris » est un terme général, sans définition reconnue. Même le Standard Methods for Examination of Water and Wastewater, la référence en Amérique du Nord pour l'examen de l'eau, n'en parle pas. Pour les mesurer, on doit donc définir un protocole analytique. Deuxième élément : l'enlèvement des débris ne fait pas partie des objectifs de traitement des eaux, parce que les unités de dégrillage, de dessablage ou de décantation les retirent complètement. On retrouve rarement du gravier, des sacs à ordures, des butées de stationnement en béton dans des eaux usées domestiques, industrielles ou même pluviales. On peut en retrouver dans les neiges usées ... Troisième élément : déterminer la quantité de débris pour un échantillon nécessite de l'utiliser au complet puisqu'il est impossible « d'homogénéiser » les débris. On doit donc prélever un autre échantillon pour les autres paramètres. Compte tenu de l'hétérogénéité des neiges usées, on ne pourrait assurer que les deux échantillons prélevés sont identiques. Le faible nombre d'analyses réalisées sur les débris présents dans des neiges usées, et ce, malgré l'importance des concentrations a cependant comme conséquence qu'on sous-estime leur valeur de contamination, au point où bon nombre d'intervenants ignorent ce paramètre. 2.3.2 Facteur climatiqueLes concentrations des contaminants dans les neiges usées peuvent être influencées par la quantité de neige tombée durant une précipitation ou par une période de fonte. Même si la circulation générait un taux de pollution constant, la diversité des chutes de neige entraînerait automatiquement une variation dans la concentration des contaminants. Lors d'une période de fonte, les chlorures vont être les premiers évacués avec l'eau de fonte, ce qui va entraîner une augmentation de la concentration des débris et des MES puisque ceux-ci demeurent majoritairement sur place. À partir des données du tableau VI, il est possible de constater que les concentrations des contaminants peuvent subir de grandes variations d'une précipitation à l'autre et pour un même secteur, à la suite de temps de collecte et d'interventions humaines similaires.
2.3.3 Facteur humainL'activité humaine influence la concentration des contaminants dans les neiges usées. La circulation, les retombées des cheminées, les ordures diverses et l'épandage des abrasifs et des fondants sont les principaux agents de contamination d'origine humaine. Le temps de séjour de la neige au sol avant sa collecte influence aussi sa concentration en contaminants. Les résultats des études de Lapointe (1991) et Paradis et al, (1993) montrent une différence significative entre les secteurs résidentiels et les secteurs mixtes (tableau IV). Le tableau VII compare les concentrations en MES du tableau VI. On constate que pour chaque précipitation il y a des différences significatives d'une ville à l'autre malgré le fait que les secteurs soient tous des secteurs résidentiels. On constate en outre qu'il y a plus de différence d'une précipitation à l'autre pour une même municipalité (170 % à 460 % pour une moyenne de 300 %) que d'une municipalité à l'autre pour une même tempête (170 % à 290 % pour une moyenne de 240 %). Il devient donc impossible de quantifier exactement les MES dans la neige d'une ville. Au mieux peut-on parler d'ordre de grandeur, étant donné que les concentrations varient énormément d'une précipitation à l'autre.
En résumé, la comparaison des différents facteurs a fait ressortir les constats suivants:
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